Le pasteur Nguyên Hông Quang, animateur spirituel d’une communauté mennonite (1) dans le deuxième arrondissement de Hô Chi Minh-Ville, a été arrêté sur les lieux consacrés aux assemblées des fidèles et à leur formation. L’arrestation a eu lieu le 14 décembre dernier à 9 heures du matin. Selon le récit des faits, diffusé minute par minute par le site officiel de la communauté mennonite du pasteur Quang (2),. ..
... elle a été accompagnée de brutalités. Quelques minutes plus tard, la police procédait à la destruction complète de la résidence qui faisait office de lieu de culte, du jardin de prière et de l’école biblique qu’il avait créée. A 12 heures, l’ensemble était totalement rasé. Une vingtaine d’étudiants de l’école biblique, présents sur les lieux, appartenant pour la plupart à des minorités ethniques, ont été appréhendés puis interrogés et enfin ramenés en voiture à leurs domiciles respectifs. D’autres informations émanant de la communauté mennonite font état de l’arrestation d’un autre pasteur; le Rév. Pham Ngoc Thach, également présent au moment des faits. Dès le début de son intervention, la police avait formellement interdit toute photographie. On peut cependant trouver une vidéo et des photos de l’opération policière sur le site de la communauté mennonite.
Les informations actuelles concernant le sort des personnes arrêtées le 14 décembre sont encore imprécises. Le 19 décembre, un journaliste de Radio Free Asia a pu contacter le pasteur par téléphone portable. Ce dernier était alors interrogé dans les locaux de la Sécurité publique du deuxième arrondissement de Hô Chi Minh-Ville. On a aussi appris le décès, le 18 décembre, d’une dame âgée vivant sur la propriété de la communauté mennonite. Elle avait été transportée, très malade, à l’hôpital par les agents de la Sécurité, lors de l’opération de police (3).
Bien que l’Eglise mennonite ait été officiellement reconnue par l’Etat vietnamien en 2007 (4), les activités religieuses du pasteur Quang sont toujours considérées comme illégales par les autorités. Le centre pastoral qui vient d’être la cible de l’opération policière était familièrement appelé « l’église de l’étable » par les fidèles qui le fréquentaient, à cause de son dénuement et de l’ancienne utilisation des lieux. Le centre fonctionnait depuis quelques années sans trop de problèmes jusqu’au moment où, au mois d’août 2010, les autorités ont fait savoir leur volonté de faire disparaître le centre pour des questions d’urbanisme, auxquelles s’ajoutait, sans doute, l’inimitié éprouvée par les autorités à l’égard d’un pasteur militant en faveur des droits de l’homme. Bien qu’il ait été averti depuis longtemps des intentions des autorités municipales, ce n’est pourtant que le 10 décembre dernier que le pasteur a pris connaissance du décret prescrivant la destruction du centre, décret qui a été exécuté quatre jours plus tard.
Les sentiments du gouvernement à l’égard du pasteur avaient d’ailleurs été révélés ouvertement par la presse officielle. Saigon Giai Phong, l’organe du Parti communiste pour la métropole du sud, dénonçait depuis longtemps ce qu’il appelait « les agissements erronés » du pasteur Quang. Avant les événements récents, deux séries d’articles l’avaient pris pour cible. Les articles de la première série, publiés du 22 au 27 septembre 2010, étaient intitulés: « Le vrai visage du pasteur autoproclamé Nguyên Hông Quang ». La veille même de son arrestation, un article passait en revue la vie du pasteur sous le titre: « Les infractions sans fin de Nguyên Hông Quang ». Un dernier texte publié dans ce même journal le lendemain de son arrestation rendait compte de l’opération policière et reprochait au pasteur et à ses amis d’avoir opposé une violente résistance aux policiers (5).
Le pasteur Quang est bien connu pour sa ferveur évangélique et pour la lutte qu’il mène depuis des décennies pour la liberté religieuse. C’est loin d’être la première fois qu’il a des démêlés avec les autorités et la police de Hô Chi Minh-Ville. Grande figure de la contestation, le pasteur Nguyên Hông Quang s’est fait connaître par ses interventions publiques en faveur de la liberté religieuse et des droits de l’homme. Dès septembre 2001, il avait attiré l’attention en soutenant face à la police une école que la communauté mennonite essayait de faire fonctionner (6). En juin 2003, en tant qu’avocat, le pasteur Quang s’était mêlé à la lutte d’une communauté protestante pour construire sa propre église dans le deuxième arrondissement de Hô Chi Minh‑Ville, malgré l’interdiction et les interventions musclées des forces de l’ordre (7).
A plusieurs reprises, il signalera dans ses lettres des persécutions subies au Vietnam par sa communauté, à Kontum et à Hô Chi Minh‑Ville (8). C’est lui que les neveux du prêtre catholique Nguyên Van Ly (9) avaient choisi comme avocat pour leur procès, un choix qui n’avait pas été ratifié par les autorités. Le pasteur Quang et cinq membres de sa communauté avaient été arrêtés le 8 juin 2004 pour avoir contrecarré des fonctionnaires dans l’exercice de leurs fonctions. Le 12 novembre 2004, le Tribunal populaire de Hô Chi Minh-Ville condamnait le pasteur à trois ans de prison et ses compagnons à des peines allant de neuf mois à deux ans d’emprisonnement. Peu après, trois des fidèles condamnés avaient été relâchés. Le pasteur Quang, lui, avait dû attendre le 30 août 2005 pour être libéré (10).
(1) Apparus en Hollande et en Allemagne au XVIème siècle, les communautés qui seront plus tard connues sous le nom de communautés mennonites s’organisent autour de Menno Simons, prêtre qui quitte l’Eglise catholique en janvier 1536. Précurseurs notamment en ce qui concerne le concept de laïcité, les mennonites doivent très tôt échapper aux persécutions politiques et religieuses. Les mennonites refusent: le baptême des enfants (ils sont anabaptistes: ils préfèrent un baptême plus tardif, précédé d’une profession de foi personnelle); l’usage des armes, et donc le service militaire; pour une minorité d’entre eux, beaucoup de progrès techniques; comme dans tous les protestantismes, le pasteur n’est pas un intermédiaire entre les croyants et Dieu.
Au Vietnam, selon des renseignements donnés par le Global Anabaptist Mennonite Encyclopaedia on line, les premiers missionnaires mennonites sont arrivés au Vietnam en 1957. Le premier baptême a eu lieu en 1961. En 1973, l’Eglise mennonite du Vietnam était déjà autonome. En 1975, elle comptait 152 fidèles; en 2003, les communautés étaient au nombre de 26 et le nombre des fidèles s’élevait à 1 100.
(2) http://hoatdong.webnode.com
(3) Radio Free Asia, 19 décembre 2010: http://www.rfa.org/vietnamese/in_depth/Elder-died-while-being-taken-by-police-to-hospital-ttruc-12192010131052.html
(4) Le pasteur Nguyên Hông Quang n’a pas participé aux négociations qui ont abouti à la reconnaissance d’une partie de l’Eglise mennonite par le gouvernement vietnamien, le 2 octobre 2007, en présence de représentants officiels de la direction mondiale de cette Eglise. Voir EDA 471
(5) http://www.sggp.org.vn/phapluat/2010/12/245978/
(6) Voir EDA 342
(7) Voir EDA 378
(8) Voir EDA 390, 391, 395, 397
(9) Prêtre de l’Eglise catholique, le P. Thaddeus Nguyên Van Ly, né le 15 mai 1946, compte parmi les principaux militants pour la démocratie au Vietnam. Son engagement, mené dans la protestation non violente, lui a valu plus de quinze ans de prison. Voir EDA 536
(10) Voir EDA 204
(Source: Eglises d'Asie, 20 décembre 2010)
... elle a été accompagnée de brutalités. Quelques minutes plus tard, la police procédait à la destruction complète de la résidence qui faisait office de lieu de culte, du jardin de prière et de l’école biblique qu’il avait créée. A 12 heures, l’ensemble était totalement rasé. Une vingtaine d’étudiants de l’école biblique, présents sur les lieux, appartenant pour la plupart à des minorités ethniques, ont été appréhendés puis interrogés et enfin ramenés en voiture à leurs domiciles respectifs. D’autres informations émanant de la communauté mennonite font état de l’arrestation d’un autre pasteur; le Rév. Pham Ngoc Thach, également présent au moment des faits. Dès le début de son intervention, la police avait formellement interdit toute photographie. On peut cependant trouver une vidéo et des photos de l’opération policière sur le site de la communauté mennonite.
Les informations actuelles concernant le sort des personnes arrêtées le 14 décembre sont encore imprécises. Le 19 décembre, un journaliste de Radio Free Asia a pu contacter le pasteur par téléphone portable. Ce dernier était alors interrogé dans les locaux de la Sécurité publique du deuxième arrondissement de Hô Chi Minh-Ville. On a aussi appris le décès, le 18 décembre, d’une dame âgée vivant sur la propriété de la communauté mennonite. Elle avait été transportée, très malade, à l’hôpital par les agents de la Sécurité, lors de l’opération de police (3).
Bien que l’Eglise mennonite ait été officiellement reconnue par l’Etat vietnamien en 2007 (4), les activités religieuses du pasteur Quang sont toujours considérées comme illégales par les autorités. Le centre pastoral qui vient d’être la cible de l’opération policière était familièrement appelé « l’église de l’étable » par les fidèles qui le fréquentaient, à cause de son dénuement et de l’ancienne utilisation des lieux. Le centre fonctionnait depuis quelques années sans trop de problèmes jusqu’au moment où, au mois d’août 2010, les autorités ont fait savoir leur volonté de faire disparaître le centre pour des questions d’urbanisme, auxquelles s’ajoutait, sans doute, l’inimitié éprouvée par les autorités à l’égard d’un pasteur militant en faveur des droits de l’homme. Bien qu’il ait été averti depuis longtemps des intentions des autorités municipales, ce n’est pourtant que le 10 décembre dernier que le pasteur a pris connaissance du décret prescrivant la destruction du centre, décret qui a été exécuté quatre jours plus tard.
Les sentiments du gouvernement à l’égard du pasteur avaient d’ailleurs été révélés ouvertement par la presse officielle. Saigon Giai Phong, l’organe du Parti communiste pour la métropole du sud, dénonçait depuis longtemps ce qu’il appelait « les agissements erronés » du pasteur Quang. Avant les événements récents, deux séries d’articles l’avaient pris pour cible. Les articles de la première série, publiés du 22 au 27 septembre 2010, étaient intitulés: « Le vrai visage du pasteur autoproclamé Nguyên Hông Quang ». La veille même de son arrestation, un article passait en revue la vie du pasteur sous le titre: « Les infractions sans fin de Nguyên Hông Quang ». Un dernier texte publié dans ce même journal le lendemain de son arrestation rendait compte de l’opération policière et reprochait au pasteur et à ses amis d’avoir opposé une violente résistance aux policiers (5).
Le pasteur Quang est bien connu pour sa ferveur évangélique et pour la lutte qu’il mène depuis des décennies pour la liberté religieuse. C’est loin d’être la première fois qu’il a des démêlés avec les autorités et la police de Hô Chi Minh-Ville. Grande figure de la contestation, le pasteur Nguyên Hông Quang s’est fait connaître par ses interventions publiques en faveur de la liberté religieuse et des droits de l’homme. Dès septembre 2001, il avait attiré l’attention en soutenant face à la police une école que la communauté mennonite essayait de faire fonctionner (6). En juin 2003, en tant qu’avocat, le pasteur Quang s’était mêlé à la lutte d’une communauté protestante pour construire sa propre église dans le deuxième arrondissement de Hô Chi Minh‑Ville, malgré l’interdiction et les interventions musclées des forces de l’ordre (7).
A plusieurs reprises, il signalera dans ses lettres des persécutions subies au Vietnam par sa communauté, à Kontum et à Hô Chi Minh‑Ville (8). C’est lui que les neveux du prêtre catholique Nguyên Van Ly (9) avaient choisi comme avocat pour leur procès, un choix qui n’avait pas été ratifié par les autorités. Le pasteur Quang et cinq membres de sa communauté avaient été arrêtés le 8 juin 2004 pour avoir contrecarré des fonctionnaires dans l’exercice de leurs fonctions. Le 12 novembre 2004, le Tribunal populaire de Hô Chi Minh-Ville condamnait le pasteur à trois ans de prison et ses compagnons à des peines allant de neuf mois à deux ans d’emprisonnement. Peu après, trois des fidèles condamnés avaient été relâchés. Le pasteur Quang, lui, avait dû attendre le 30 août 2005 pour être libéré (10).
(1) Apparus en Hollande et en Allemagne au XVIème siècle, les communautés qui seront plus tard connues sous le nom de communautés mennonites s’organisent autour de Menno Simons, prêtre qui quitte l’Eglise catholique en janvier 1536. Précurseurs notamment en ce qui concerne le concept de laïcité, les mennonites doivent très tôt échapper aux persécutions politiques et religieuses. Les mennonites refusent: le baptême des enfants (ils sont anabaptistes: ils préfèrent un baptême plus tardif, précédé d’une profession de foi personnelle); l’usage des armes, et donc le service militaire; pour une minorité d’entre eux, beaucoup de progrès techniques; comme dans tous les protestantismes, le pasteur n’est pas un intermédiaire entre les croyants et Dieu.
Au Vietnam, selon des renseignements donnés par le Global Anabaptist Mennonite Encyclopaedia on line, les premiers missionnaires mennonites sont arrivés au Vietnam en 1957. Le premier baptême a eu lieu en 1961. En 1973, l’Eglise mennonite du Vietnam était déjà autonome. En 1975, elle comptait 152 fidèles; en 2003, les communautés étaient au nombre de 26 et le nombre des fidèles s’élevait à 1 100.
(2) http://hoatdong.webnode.com
(3) Radio Free Asia, 19 décembre 2010: http://www.rfa.org/vietnamese/in_depth/Elder-died-while-being-taken-by-police-to-hospital-ttruc-12192010131052.html
(4) Le pasteur Nguyên Hông Quang n’a pas participé aux négociations qui ont abouti à la reconnaissance d’une partie de l’Eglise mennonite par le gouvernement vietnamien, le 2 octobre 2007, en présence de représentants officiels de la direction mondiale de cette Eglise. Voir EDA 471
(5) http://www.sggp.org.vn/phapluat/2010/12/245978/
(6) Voir EDA 342
(7) Voir EDA 378
(8) Voir EDA 390, 391, 395, 397
(9) Prêtre de l’Eglise catholique, le P. Thaddeus Nguyên Van Ly, né le 15 mai 1946, compte parmi les principaux militants pour la démocratie au Vietnam. Son engagement, mené dans la protestation non violente, lui a valu plus de quinze ans de prison. Voir EDA 536
(10) Voir EDA 204
(Source: Eglises d'Asie, 20 décembre 2010)